Les îles du santal. Elytis, 2011

couv IDS

Octobre 1816.

Après une rupture amoureuse, Alban, âgé de dix-sept ans, décide sur un coup de tête de quitter sa famille et son métier de batelier pour le grand large. Au hasard d’une rencontre, c’est le Bordelais, en partance pour un voyage de trois ans, qui l’accueille à son bord. Quand le trois-mâts met l’ancre dans la baie de Taiohae, aux Marquises, le mousse est ébloui par un étrange éden où sensualité et cannibalisme se côtoient, dans une civilisation aux antipodes de la sienne. Pour les tribus de l’île de Nuku Hiva, la vie quotidienne, sous la protection du peuple des dieux, est inchangée de mémoire d’homme. Mais le temps d’embarquer le bois de santal convoité, marins et indigènes prennent peu à peu conscience des bouleversements dont cette escale est annonciatrice.

Premières pages

EXTRAIT

“Lisle-sur-Tarn, septembre 1816

Le garçon vit trop tard le cordage tendu qui reliait la longue embarcation sombre au pieu planté dans la berge. Il s’étala de tout son long sur la vase caillouteuse du bord et son bonnet fut projeté sur l’eau de la rivière. Pataugeant pour aller le repêcher avant qu’il ne sombre, il maudit sa maladresse et sa distraction. La nuit tombait sur les bâtisses de brique trapues qui constituaient la bourgade de Lisle et les martinets se donnaient la chasse à grands cris stridents au-dessus des tuiles orangées. Frottant sa chemise tachée, Alban se sentit soudain submergé par la colère comme par une vague de cette eau brune que la tempête parfois agitait en furieux remous. Non, ce n’était pas possible, elle ne pouvait pas lui préférer celui qu’elle appelait son fiancé, juste parce qu’elle avait appris à marcher en même temps que lui et que leurs familles avaient décidé de réunir leurs arpents de vigne ! Il allait lui parler une fois encore, elle l’aimait toujours, elle devait bien l’aimer encore, même si elle ne voulait plus le dire. Inexplicablement, à cet abattement qui durait depuis une semaine, succéda un état d’intense d’euphorie. Une semaine qu’elle lui avait annoncé que son choix était fait, qu’elle ne pourrait plus le voir. Plus de la même façon. Les familles s’étaient mises d’accord pour la date du mariage. Mais cette noce n’aurait pas lieu. Oui, c’était l’évidence même, il allait promettre à Émeline la belle vie qu’ils auraient ensemble. C’était lui et lui seul qu’elle devait épouser. Bientôt, avec ce que lui rapportait son association avec son oncle, il pourrait acheter son propre bateau et l’emmènerait sur le courant du Tarn, puis sur la Garonne jusqu’à Bordeaux, la ville aux mille curiosités.

Il s’engagea en hâte sous la porte fortifiée du port, vers la place de la halle où logeait la jeune fille, sans se soucier de la boue maculant son pantalon de toile claire. En cette soirée de septembre, il y avait encore du monde dans les ruelles. Mais il ne voulait pas voir toutes ces têtes connues et mille fois croisées, si connues qu’il répétait avec chacun les mêmes paroles jour après jour. Il ignora la mère Yvrac à sa porte et les frères Duprat qui excitaient leurs bœufs pour les faire reculer et décharger la vendange dans leur chai. Une autre fois, il se serait arrêté pour le coup de main, mais aujourd’hui, il n’y avait qu’une seule chose qui existait, une seule chose à faire. Un vent frais soufflait de l’aval de la rivière, agitant les larges feuilles des figuiers dont les fruits bleuissaient. Il arriva sous les arcades de la grande place et s’engagea sous un porche ouvert alors que les premières étoiles piquaient le voile sombre qui descendait sur le village. Il avait vu, là-haut, de la lumière à la fenêtre de la mansarde d’Émeline. Elle était déjà rentrée de son service. Il s’engageait, euphorique, dans l’escalier du deuxième étage encombré de vieux ustensiles de cuisine quand il ralentit, l’oreille blessée par les sons qu’il percevait. Il monta encore deux marches et s’arrêta tout à fait, le cœur battant trop vite. De la porte en bois ciré qui fermait le haut de l’escalier, lui arrivaient des bruits qu’il n’identifiait que trop bien. De petits gémissements, des ahanements plus graves et les grincements du lit. Ainsi, il n’y avait plus de doute à avoir. Elle s’était bien pressée de l’oublier, de se donner toute à l’autre. Il ne verrait plus ses yeux verts fixés dans les siens. Il ne toucherait plus ce corps à la peau pâle dont l’absence l’obsédait. Une vague de rage l’emporta, le libérant de sa stupeur immobile. Attrapant une casserole de fonte ébréchée posée au coin d’une marche, il la lança à toute volée contre la porte du repaire ennemi. Dans un bruit de tonnerre, l’objet se cassa, brisant dans le choc les planches de la frêle porte et déclenchant un cri strident bientôt suivi d’exclamations dans toute la maison. Il redescendit sourd et aveugle, si vite que les habitants alarmés sortis sur le palier du premier étage eurent du mal à le reconnaître.”

Librairie Terra Nova, Toulouse. Entretien avec Jean-Marie Guilloux

 

Serge Legrand-Vall m’a demandé d’animer cette conversation avec vous et lui… à propos de son dernier ouvrage : “Les îles du Santal”, aux Marquises dans le sillage du Bordelais. De ce livre, il en parlera, en évoquera et les contours, et l’histoire et le sens. Rien de plus saillant que la parole d’un écrivain sur ses propres écrits. Pour ma part je vais me livrer avant tout, avec l’esprit libre du lecteur, l’esprit du silence, car lire se fait dans le silence de sa propre intimité en quête, par endroits, de celle de l’auteur. Je vais me livrer à cet exercice de funambule qui consiste en une maïeutique toujours incertaine, intuitive, entre ce que je sais de l’auteur, de sa vie, et ce que je ne savais pas… transmis par l’écriture. C’est-à-dire un acte d’imaginaire, de création. Reste ceci : l’œuvre de l’écrivain et sa vie sont intimement liées. Elles ne font parfois plus qu’un. C’est d’ailleurs le thème de ce livre. Page à page, surgit ce maillage entre deux histoires et ce maillage constant entre ce qui nous habite tous et sur lequel nous pouvons ressentir le plus souvent un éparpillement, une tension : le lieu de ses propres racines, la quête d’être aimé, la vie tracée jusqu’à la mort, l’éveil de soi, la sensation du manque, la distance du temps, celle de l’éloignement, le lieu du voyage, la quête d’aimer, le désir d’inattendu… Bref un moteur complexe, celui de nos vies, avec cet inaccessible toujours envisagé sans en dénicher réellement le fil ou sans oser le dénicher (on remet toujours à demain ?), le fil de la Liberté. Le fil est déjà là chez Serge Legrand-Vall. Une liberté déjà accomplie. Ou plutôt une Liberté déjà conquise… non pas dans une version glorieuse. Mais parce qu’il n’y avait sans doute, pas d’autre choix possible que d’y tenir. Le lieu des racines. Serge Legrand-Vall nous apprend à rejeter toute idée « identitaire ». Il n’y a pas de racines. Ce n’est pas le terroir qui nous incarne… mais notre parcours. C’est en passant de la seule langue occitane en l’accompagnant en soi vers Bordeaux la française que le langage nous éclaire enfin. Car c’est nous-mêmes qui projetons nos racines… jusqu’à traverser le monde pour se retrouver toujours soi, aux antipodes des rituels qui nous envahissaient.

La quête d’être aimé, La quête d’aimer Serge Legrand-Vall nous apprend que cette quête n’est pas uniquement l’apanage d’un manque qui ferait de nous des êtres insatiables. Mais bien au contraire, cette quête peut se jouer par ceux qui ont été aimés. Mais que cet amour-là a gardé sa part de mystère. Juste ce qu’il faut pour désirer soi et non pas uniquement se projeter à travers le désir des autres. La vie tracée jusqu’à la mort. Serge Legrand-Vall nous apprend à déjouer sans cesse la « Sagesse » incarnée par les « autres »… Cette sagesse qui consisterait à se protéger des tourments, à se garantir une vie « normale » sans exception mais avec les autres, à se construire un avenir uniquement avec ce que l’on a sous la main et non ce que l’on est. Avec le risque de se retrouver vieillard en se disant que l’on fut trop crédule (quelle folie !), à trop écouter cette menteuse sagesse qui nous murmure sans cesse : « Demain… Tu as bien le temps ! » Et en se souvenant d’élans et des innombrables joies sacrifiées. Chaque occasion perdue narguant notre sotte prudence. L’éveil de soi. L’inattendu. La Liberté habite le jeune Alban, héros de ce roman. Elle le hante. Lui pense qu’il a déjà fait son temps. Demain c’est aujourd’hui. Jeune, il n’écoute pas cette menteuse sagesse, il acte ce que nous espérons tous : vivre libre. C’est-à-dire se retrouver soi. Comme c’est déjà le cas. La liberté est là chez ce très jeune homme. Mais elle ne sonne pas comme l’ivresse d’une joie débridée comme on se retrouverait tout à coup sorti d’une cage, sans entraves, toutes amarres larguées. Non. Elle le structure, elle seule vient à son secours. Son seul secours. Depuis sa naissance. Un enfant de la honte comme on disait à l’époque. Oublié par son père, abandonné par sa mère partie pour les Amériques, « arraché » à sa grand- mère… par des parents adoptifs et démunis à qui il nomme sa gratitude. « J’aime, alors il faut partir » semble t il nous dire, nous signifiant plus encore ce qu’exprimait Cendrars dans l’homme foudroyé. Cette liberté des amarres. Alban a fait son temps… il faut lire ceci : «Un pan de sa vie se terminait dans des tournoiements de jupes ». Il a le sens des amarres. Les siennes. Lorsqu’il apprend à construire l’indifférence. Celle des orphelins. Celle de celui « qui sait déjà tout ». Mais « ne dit pas » comme s’il apprenait. Pour ne pas être une exception, mais plutôt une «normalité » sociale avec les autres. Lorsque seul, il parlait à sa mère… absente certes. Mais sa mère. Des amarres aussi entre tous ces espaces contradictoires dont le seul point vivant de rassemblement c’est lui. Lorsqu’il part sur les traces de sa mère vers les Amériques, il s’éloigne de ce dialogue avec elle. Il s’émancipe d’elle. Serge Legrand-Vall nous invite à mieux cerner les paradoxes de la géographie humaine. Celle de l’espace et du temps. Lui seul peut nous faire entendre que l’Océan est déjà là, palpable, présent, à Lisle-sur-Tarn. Que Agen est un port ouvert au grand large comme le Marseille de Pagnol ou plutôt l’Alexandrie du poète Cavafy. Son port. A Bordeaux, alors qu’il est sur le départ, une jolie jeune femme lui donne un ruban rouge, une nouvelle attache pour le voyage, pendant qu’un vieux loup de mer lui rappelle ceci : «Un marin n’a pas d’autre pays que les ports ». Ce livre n’est pas un écrit sur le voyage. Ici le voyage n’est pas un but mais le voyage lui-même, par les épreuves traversées, est un véritable retour sur soi-même. Quelle que soit la terre qu’il abordera au bout de ses épreuves, elle sera, immanquablement, le pays de sa véritable origine.

Jean-Marie Guilloux

 

https://soundcloud.com/sergivall/les-les-du-santal-la-librairie

Librairie Mollat, entretien avec Naly Razakandraïbé

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Vidéo de la présentation :  https://vimeo.com/19792794

 

Voici le texte introductif de Naly :

Un bateau livre. Premières lignes, premières chutes. Dans le même mouvement, nous voici dans l’action. Une écriture efficace, prenante. Une lecture vivante comme peut l’être un spectacle, un film. Serge Legrand-Vall ne s’alourdit pas de psychologisme. L’intention est narrative. L’enjeu se joue tout en joie. Une allégresse de sensations, une jubilation quiète, la luxuriance d’un vocabulaire tout en voyelles et à chaque page un parfum, un courant d’air porté aux narines du lecteur… On lit aussi avec son nez. Comme les yeux détectent le mouvement dans l’immobilité d’une écriture. Le nez attrape la vie dans l’invisibilité d’un effluve. Ces bouffées de lecture font cette allégresse et nous poussent tel un bateau livre d’une Lisle à d’autres. De Lisle-sur-Tarn, la bourgade tarnaise où Alban vit, Aux îles Henua Enana, le Pays des hommes, les îles Marquises selon d’autres hommes. Avec le jeune mousse, le lecteur respire ce voyage et l’on se grise à tourner les pages. Après une seconde chute dans le port de Bordeaux et celle évitée de justesse sur le Tarn, il devra s’agir pour Alban d’être vigilant pour la suite. Mais bon… L’auteur invite et l’écriture incite à garder tous nos sens en éveil. Si ce roman est initiatique, il l’est assurément d’abord pour son auteur. Premier roman comme un baptême. S’il fallait un parrain dans une filiation littéraire d’auteur-conteur, André Dhôtel, forcément hospitalier, pourrait être celui-ci et Gaspard, personnage central de son roman “Le pays où l’on n’arrive jamais”, prix Femina en 1955, une doublure d’Alban. Même profil de héros, même filon d’aventure, même fil narratif tressé de poésie. Ici, sur l’océan Pacifique, comme dans la forêt ardennaise de Dhôtel, le voyage est littéralement un prétexte pour nous conduire, dans un vrai plaisir de lecture, vers un en dedans de soi où se déploie le destin des personnages fictifs et celui de qui l’écrit. Chaque livre est une île dans la mer intime de nos lectures. Par-dessous les vents et les courants, toutes communiquent entre elles. Lecteurs, clandestins par définition, nous attendons la prochaine île de littérature, nouvelle destination de cet auteur accoucheur et accouché. Alors, à nouveau, nous voyellerons avec lui. Un seul mot d’ordre, de luxe, de calme et de volupté à l’annonce de ce futur accouchement dont il sera à la fois le père et le fils. Une injonction amicale et exotique empruntée aux cousins du Pays des hommes : Va, y nais !

Naly Razakandraïbé

 

 

 

Genèse d’un roman

 

L’histoire de ce roman a commencé le jour où je suis entré dans l’ancienne maison de vacances de Victor Duruy, homme politique et historien du XIXe siècle. Cette demeure dominant la vallée de la Dordogne appartenait toujours à ses descendants et la volumineuse bibliothèque de l’ancêtre ne semblait pas avoir bougé. En observant avec curiosité les ouvrages, un petit livre attira mon attention. Écrit par un missionnaire en 1843, il exposait les mésaventures de deux évangélisateurs, envoyés dans l’île Marquisienne de Tahuata, en plein océan Pacifique, et livrés à eux-mêmes au milieu de naturels plutôt rugueux et sourds à la parole du Dieu venu de France. Une carte de l’archipel était jointe à l’ouvrage. Je fus très surpris de découvrir que le bras de mer séparant les îles d’Hiva-Oa et de Tahuata y était désigné sous le nom de Canal du Bordelais. Un bateau en provenance de Bordeaux avait donc en ce milieu XIXe touché ces côtes peu visitées et laissé sa trace en baptisant un lieu ? Suite à la publication d’un essai, Toulouse Bordeaux l’un dans l’autre, dans lequel j’évoquais cette curiosité, un lecteur bordelais très au fait de l’histoire maritime de la ville a tenu à éclairer ma lanterne. Dans son courrier, il me livra le début de l’explication : Entre 1816 et 1819, un capitaine de la marine royale du nom de Camille de Roquefeuil avait effectué pour l’armateur bordelais Jean Étienne Balguerie un tour du monde sur le trois-mâts marchand Le Bordelais. Voyage au cours duquel il avait fait escale aux Marquises, baptisant un Canal du Bordelais et un Cap Balguerie. Rentré au pays après trente-sept mois et deux jours de mer, le capitaine français avait même publié un ouvrage relatant son épopée. Mis en appétit par cette révélation, je me mis en quête du livre en question. Si un exemplaire de l’édition originale de 1823 se révéla introuvable, j’eus une fois encore la bonne surprise d’apprendre qu’un auteur du nom de René Cruchet avait publié en 1952 à Bordeaux un ouvrage qui rappelait à ses contemporains ce haut fait de l’histoire maritime. Des extraits du livre de Roquefeuil assortis des commentaires de l’auteur firent toute la lumière sur les circonstances et les buts de cette unique circumnavigation de l’histoire effectuée par un trois-mâts marchand parti de Bordeaux. En 1816, La France de la restauration, ruinée par les guerres napoléoniennes, était en manque de liquidités pour l’importation de marchandises. L’idée de l’armateur Jean Étienne Balguerie fut d’aller prospecter sur la côte ouest du continent américain, à la recherche d’un fret avantageux à troquer contre des marchandises européennes de faible valeur. Ce fret devait ensuite être échangé dans les ports chinois contre du thé et des porcelaines qui seraient revendus avec profit en Europe. Immobilisé par l’hiver devant Vancouver sans avoir trouvé le fret espéré, le capitaine décida d’aller passer la mauvaise saison sous des latitudes plus clémentes et relâcha deux mois aux îles Marquises.

Attirés par leur richesse en bois de santal, les premiers navires marchands américains y faisaient alors escale, et quelques aventuriers des mers avaient élu domicile parmi ses farouches tribus. Roquefeuil noua des relations amicales avec les insulaires et repartit avec vingt et une tonnes de santal qu’il avait échangé contre de la poudre et des fusils.

L’escale du Bordelais s’inscrit dans le contexte du développement de l’exploitation des ressources de l’océan Pacifique par les nations d’Europe et d’Amérique du Nord au début du XIXe siècle. À l’arrivée du Bordelais, en décembre 1817, l’archipel isolé des Marquises n’avait reçu que très peu de visites des Européens et faisait figure d’Eden. Comme dans le reste du monde polynésien, les insulaires avaient construit un système social et religieux complexe. Depuis le voyage de Bougainville à Tahiti, le mode de vie Maori, fait d’indolence et de lascivité, mais qui incluait le cannibalisme, fascinait l’occident. L’introduction de l’alcool et des armes à feu par les navires baleiniers et santaliers mais aussi l’apparition de maladies inconnues et mortelles se révélèrent désastreuses pour les indigènes. Avant l’arrivée des Européens, on estimait la population de l’archipel à cinquante mille personnes. À partir de 1842, année de la prise de possession de ces îles pour la France par l’amiral Dupetit-Thouars et du séjour à Nuku-Hiva d’Herman Melville, la mortalité prit des proportions dramatiques. L’auteur Jean-Louis Teuruarii Candelot parle de cataclysme pour qualifier les effets sur le peuple marquisien de la deuxième moitié du XIXe siècle. Sous les actions conjuguées des navires de passage, de l’administration française et des missionnaires, la civilisation marquisienne s’effondra et la population passa près de la disparition, puisqu’il ne restait dans tout l’archipel qu’un peu plus de deux mille personnes en 1926. Le tour du monde du Bordelais ne fut pas une réussite commerciale et les armateurs du port de la lune ne donnèrent aucune suite à ce voyage exploratoire qui fut rapidement oublié. Il reste dans le récit du Capitaine de Roquefeuil l’éblouissement de l’équipage pour la beauté de ces îles et la douceur de leurs habitants. Siepky, marin engagé à Bordeaux pour sa connaissance des mers du sud et promu officier pendant le voyage, s’est rapidement imposé à moi comme le personnage clé du roman. Le mystère même qui lui est attaché le rendait idéal pour rassembler l’histoire et la fiction.

 

 

 

Un port d’attache

Le “Resolution” du capitaine Cook aux Marquises, 1774. (Du blog Les marquises par Purutaa)

 

Le 23 mars 2010, après un long voyage, ce roman vient de trouver son éditeur : Elytis, à Bordeaux. Je ne saurais trop remercier ceux qui m’ont apporté leur aide, Pierre Veilletet, Joël Couttausse et René Doudard Purutaa, l’indispensable guide marquisien sans lequel tout aurait été encore plus difficile. Cette image d’un navire du capitaine Cook abordant aux Marquises en 1774 (quarante ans avant l’action du roman) est sûrement assez proche de celle du Bordelais dans les mêmes eaux. Au bout de la traversée, les romans, comme les navires, ont besoin de trouver un port.

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Serge Legrand-Vall en dix dates

1958. Naissance à Montauban.

1964. De l’Ariège à la Normandie, changement de décor et de patronyme.

1976. École Supérieure des Arts appliqués Duperré / Paris.

Auditeur libre en Ethnologie, civilisations amérindiennes / Paris VII Jussieu.

1986. Ateliers Cinématographiques Sirventès, écriture scénaristique / Toulouse.

1995. Bordeaux.

2005. Toulouse Bordeaux l’un dans l’autre (essai), première publication.

2011. Les îles du santal, premier roman suivi d'une résidence d'écriture aux îles Marquises pour La part du requin.

2013. La rive sombre de l’Ebre.

2018. Résidence d'écriture à Barcelone pour Reconquista, avec le soutien de la région Nouvelle-Aquitaine.

2022. Un oubli sans nom.

Plus :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Serge_Legrand-Vall

Les avis de lecteurs :

https://www.babelio.com/auteur/Serge-Legrand-Vall/111133

L'actu :

https://www.facebook.com/serge.legrandvall

Les livres en stock dans les librairies indépendantes :

https://www.placedeslibraires.fr/

Et les indispensables :

https://www.editionsin8.com/

https://www.editionselytis.com/

D'abord pourquoi vendredi écriture ?

Pour écrire, pendant une vingtaine d'années, j'ai défendu comme une citadelle assiégée mon vendredi. Le siège a été levé en 2020 et j'écris désormais tous les jours si je veux. Mais c'est grâce à tous ces vendredis que j'en suis arrivé là. 

 

À propos de mon rapport au vrai et à l'imaginaire dans l'écriture,

je ne résiste pas au plaisir de vous livrer cet extrait du monde selon Garp de John Irving :

“Il attendait le moment où elle lui demanderait : et alors ? Qu'est-ce qui est vrai, qu'est-ce qui est inventé ? Il lui dirait alors que rien de tout ça n'avait la moindre importance ; Elle n'avait qu'à lui dire tout ce qu'elle ne croyait pas. Il modifierait alors cette partie. Tout ce qu'elle croyait était vrai ; tout ce qu'elle ne croyait pas devait être remanié. Si elle croyait toute l'histoire, dans ce cas, toute l'histoire était vraie.”