Aqui ! Les lectures du vendredi : Les îles du santal

Aqui ! Les lectures du vendredi : Les îles du santal

Il y a quelques jours, les éditions Elytis faisaient escale au Musée des Douanes de Bordeaux. Place de la Bourse, à l’heure où le fleuve esseulé se plait à murmurer à la brume les chants des marins oubliés, l’esprit était à la fête : on retraçait là la traversée d’Elytis, entre 2000 et 2010. Dix ans déjà, un beau voyage, durant lequel les malles s’emplirent de multiples trésors. Une destinée qui fait la part belle aux découvertes, aux passionnés de tout bords, aux utopies rassérénantes. En signe de pacte que le voyage ne fait que commencer, et pour l’occasion de cet anniversaire, l’équipe d’Elytis offre à lire « Les îles du Santal » de Serge Legrand-Vall. Hissez haut! On retrouve avec cet opus de la collection Grands Voyageurs, un de ces albums où l’on aimait, enfant, dévorer aventures, héroïsmes, rêves fous : Un format dont l’amplitude fait que l’on se pose dans l’histoire, avec respect et attention ; des lettrines évocatrices qui font qu’on s’embarque en lecture comme en contrées lointaines ; des illustrations enfin, à l’image de celles devant lesquelles le lecteur de jadis laissait voguer son esprit vagabond. Le décor ainsi posé, que viennent les personnages, que viennent les flots des grandes aventures ! Serge Legrand-Vall nous pousse dans le sillage d’Alban, jeune aquitain à qui la première blessure d’amour fait larguer les amarres. Du port de Bordeaux il quitte sa terre pour la mer, à bord du « Bordelais » en partance pour les îles, celles aux doux noms de femmes ensorceleuses: les Marquises. Du grand voyage il apprend la rudesse de sa nouvelle vie d’homme, la peur mêlée d’envie, la camaraderie, la ruse. Comme si l’air du large concentrait dans ses embruns, tout ce que le monde compte de visages, tout ce que la vie compte de couleurs. Mais aux abords des îles, il arrive que la réalité se farde, que les repères se brouillent. D’un paradis enchanteur émerge aussi un monde où les influences mouvantes entament leur travail de sape. Où les traditions ancestrales, fidèles à leurs valeurs d’accueil et de générosité, se corrompent soudain, prises au piège d’une danse sournoise, hélas irréversible. « Les îles du Santal » donnent à rêver, mais aussi à réfléchir ce qui ne gâche rien. Invitation au voyage où s’invitent également le recul nécessaire à toute prise de conscience, le clair-obscur du peintre qui sculpte le relief. Ne dit-on pas que les voyages forgent la jeunesse ? Sous la forge du temps, la jeune Elytis trace sa route. Puisse-t-elle, à l’instar des héros dont elle porte les couleurs, voguer toujours plus loin, toujours aussi fièrement. Hissez haut !

Anne DUPREZ

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                                                                    Lecture de Bénédicte Chevallereau, musée des Douanes, janvier 2011

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